Comme à son habitude Meyrin Hawke aimait se promener dans le parc. Non pas qu'elle y trouvait un certain réconfort à son mal mais il lui permettait de sortir durant quelques heures afin d'y prendre l'air. Ce dernier était frais, plutôt agréable, et appâtait les clients sur les différents stands de nourriture du lieu. Peu encline à manger quoi que ce soit, elle ne s'y arrêtait jamais. Toute cette nourriture lui donnait la nausée, et pour cause, elle mangeait de moins en moins, et était, de plus, incapable d'apprécier les mets qu'elle se préparait. Tout avait bien changé depuis la fin de la seconde guerre. Alors qu'elle était à l'époque si joyeuse, voila qu'elle n'adressait plus aucun sourire à qui que ce soit; ni même sa sœur. Après quelques instants d'arrêt, Meyrin reprit son trajet. Les yeux cernaient, elle ne ressemblait pourtant pas à une femme fatiguée par les aléas de la vie, mais plutôt à une personne préoccupée. Et pour cause ! Cette dernière était devenue un membre de Requiem. Jamais cette dernière ne l'avait avoué à qui que ce soit et pourtant, elle ne pouvait s'empêcher d'en ressentir de la satisfaction. Jamais elle ne s'était sentie aussi importante depuis sa rupture avec Athrun. Athrun... Cet homme qui l'avait laissée pour retourner auprès de sa Cagalli. Pourtant ! Il avait pris soin d'elle sur l'archangel. Elle lui avait sauvé la vie et avait promis auprès de Cagalli de le protéger. Apparemment, cela n'avait pas servi à grand chose et ce qu'elle croyait être de la bonté s'était révélé être de la manipulation, ou tout simplement du profit. Regardant droit devant elle, la jeune femme pouvait y trouver un certain réconfort. Elle avait gagné en maturité, mais aussi en confiance. Jamais elle n'avait été aussi sûre d'elle et consciente qu'elle aidait Requiem à détruire des vies. Oui, elle était un monstre. Malgré le fait qu'elle n'ait jamais versé une seule goutte de sang, Meyrin était la plus à détester. Chaque jour, elle vivait dans un petite coin de paradis, à profiter des services de sa nation. Alors que, de son côté, elle travaillait pour la détruire.

Mais n'avait-elle pas une raison valable dans tout ça ? Après tout, et sans tenir compte de la trahison d'Athrun, le peuple ne le méritait-il pas ? Les naturels étaient les premiers qu'elle visait. Eux qui n'avaient pas hésité à utiliser leur "manipulation" et à les détruire une fois hors de contrôle. Les coordinateurs étaient pourtant bien mieux que les coordinateurs. Jamais ces derniers n'ont eu dans l'idée de détruire la planète terre. À part peut-être Patrick Zala qui fut arrêté par des coordinateurs ou les terroristes qui furent eux aussi arrêtés par eux. Jamais les naturels n'avaient ressentis un quelconque regret envers les coordinateurs. Cela méritait donc bien un semblant de justice. Concernant son pays, elle ne douta plus lors du coup d'état. Ainsi, ce qu'elle croyait être une amie s'était arrogée le titre de reine ? Que faisait-on de la démocratie du peuple ? Où étaient les choix des citoyens ? Plus le mal s'intensifiait, et plus les naturels ainsi que les coordinateurs aggravaient leurs cas. Et elle dans tout ça ? Devait-elle vraiment se donner le titre de monstre ? Après tout, elle n'avait pas commis de génocide, de meurtre, ou tout autre crime dont l'être humain avait le secret. Non. La jeune femme voulait juste changer les choses à sa manière.

- Shauni ?

Ce code. Voila bien longtemps qu'elle n’espérait plus l'entendre de la bouche de quelqu'un. Ce mot venait de sortir de la bouche d'un élégant jeune homme, et fort heureusement pour elle d'ailleurs. Un grand sourire, les yeux fermés, elle s'assit auprès de l'inconnu avant de l'embrasser délicatement sur la joue et lui prendre affectueusement la main. Pour la discrétion, cela pouvait semblait rater mais à y réfléchir, qu'y avait-il de plus normal qu'un couple dans un parc ?

«Je me demandais quand tu allais venir me voir. C'est cruel de faire attendre une jeune fille de cette manière» Dit-elle en faisant la moue. «Néanmoins, j'espère que ce comportement n'est pas dû à mon inutilité. Tu sais que j'apprécie de t'aider lorsque tout semble ne pas aller pour toi.» Finit-elle par dire en lui adressant un joli sourire.

Fort heureusement pour elle, le jeune homme comprit rapidement où elle voulait en venir et joua le jeu à la perfection. À présent, ils étaient tous les deux un couple aux yeux des coordinateurs qui marchaient paisiblement dans le parc. Néanmoins, cette situation était loin de lui plaire. Après Athrun, elle avait évité avec beaucoup d'attention la gente masculine. Cependant, la rupture n'avait pas été violente. Elle avait dû l'aimer un peu trop. Tout avait été si vite. Athrun lui avait apprit son départ pour Orb afin de retourner auprès de la femme qu'il avait toujours aimé. Pauvre idiote qu'elle était, elle n'avait pas osé lui révéler les sentiments qu'elle portait à son égard et avait acquiescé, comme à son habitude, en espérant qu'il soit heureux avec elle. Bien des nuits elle regrettait ce choix. Que se serait-il passé si elle l'avait retenu ? Maintenant, la député d'Orb profitait de l'homme qu'elle avait aimé sans même penser à ce qu'elle avait ressenti en le voyait quitter les Plant's. Bien évidemment, après trois années, elle ne l'aimait plus. Elle n'était pas idiote. Cependant, la colère était toujours là. Et c'est ce qui faisait sa force.

«Athrun Zala. Ce nom a l'époque me faisait frémir. Il était si beau, si fort et si mature. Je ne voyais en lui que des qualités et bien peu de défauts.» Murmura-t-elle.« Mais, apparemment je n'étais pas assez bien pour lui. Beaucoup de monde ignore que ce n'est pas ce rejet qui m'a rendue ainsi mais ce que j'en ai compris par la suite. Après la fin de la seconde guerre, le monde ne s'en est pas porté mieux pour autant. Moi qui était si naïve à l'époque, il m'a fallut le rejet de l'homme que j'aimais pour me rendre compte que le monde n'était pas si rose. Pourtant, je tente tant bien que mal de me pardonner ma faiblesse d'esprit. Il est si rassurant d'imaginer que tout allait bien. Que les gens étaient heureux et que la haine n'existait plus. Mais je les vois. Je vois ces gens qui, chaque jour, regardent désespérément les photos de leurs proches en sachant qu'il leur sera impossible de les venger. J'ai tellement de colère en moi. Non pas contre le peuple mais contre les dirigeants qui nous sortent les mêmes discours de paix alors qu'il n'y a pas encore eu de pardon réciproque. Il n'y en aura jamais. C'est impossible de pardonner ce que l'armée a fait à la population. De quel droit les dirigeants se permettent-ils de dire le contraire ?»

Meyrin venait de s'étonner elle-même. Jamais elle n'avait pu expliquer à qui que ce soit les raisons de son chagrin et voila que, d'un coup, elle venait de se libérer, de comprendre ses véritables motivations. Le problème était tout autre mais surtout bien plus raisonnable. Elle n'était pas une folle qui chercher la vengeance contre un ex petit ami. Non. Elle était en colère contre les politiciens qui forcent la population à croire en leurs idéaux.

«Le monde se ment.» Termina-t-elle.